Sommaire
- Que font les banques de notre argent ?
- Les financements et les investissements
- Les financements
- Les investissements
- La finance, premier pollueur mondial ?
- Notre argent finance la crise climatique
- Un soutien aux bombes climatiques…
- … et à la déforestation
- Les banques ne devraient pas être le problème mais la solution.
- Comment mesurer la responsabilité climatique des banques ?
- Réorienter les fonds financiers vers la transition écologique
- Comment faire sa part ?
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Si vous demandez au hasard à des personnes dans la rue si elles possèdent un compte bancaire, il est probable que toutes vous répondent oui ! Selon une étude de la Cour des Comptes en 2021, plus de 99% des Français et Françaises ont au moins un compte bancaire (courant ou épargne), soit 30 points de plus que le niveau mondial et légèrement au-dessus du niveau européen.
Cela s’explique par la centralité des services bancaires dans notre quotidien : pour payer avec notre carte, pour mettre de l’argent de côté, recevoir un crédit ou encore transférer de l’argent. Les banques sont indispensables à notre quotidien.
Si vous demandez à ces mêmes personnes dans la rue, d’où viennent selon elles les principales émissions de gaz à effet de serre des banques, il est probable qu’elles vous parlent de la consommation d’énergie des bâtiments ou des serveurs informatiques.
Sauf que l’immense majorité des quantités de CO2e sont issues de leurs activités financières : elles apportent un soutien financier à des entreprises, et notamment aux industries fossiles qui génèrent énormément de gaz à effet de serre. Ce sont ces mêmes gaz à effet de serre qui s’accumulent dans l’atmosphère depuis 200 ans et qui sont à l’origine du changement climatique actuel. L’ONG Oxfam estime dans un rapport de 2020 que les émissions des 6 plus grandes banques françaises ont atteint sur une année plus de 3,3 milliards de tonnes équivalent CO2, soit 7,9 fois les émissions territoriales de la France.
C’est ce constat qui a fait naître Green-Got. Notre futur est menacé et ce (en partie) à cause des choix d’investissements et financements des banques, qui plus est avec notre propre argent. Avec Green-Got, il est possible de changer la finance et de reprendre la main sur le monde que notre argent construit en choisissant de soutenir la transition écologique et énergétique.
Que font les banques de notre argent ?
Revenons en arrière. On ne le sait que trop peu, mais notre argent ne dort pas tranquillement à la banque, il a une vie bien remplie et finance encore trop souvent des entreprises qui peuvent nuire au climat.
C’est ce point qu’Oxfam étudie depuis plusieurs années dans des études comme « Banques : des engagements à prendre au 4ème degré », qui montre que les grandes banques françaises nous emmènent vers un réchauffement à +4°C d’ici à 2100, loin de l’objectif de 1,5°C recommandé par les scientifiques, au-delà duquel les conséquences des changements climatiques seront incontrôlables.
Les financements et les investissements
Les banques sont indispensables à notre économie actuelle : elles permettent à la fois de conserver notre argent en sécurité, de le faire circuler et de fournir des financements aux entreprises. Le problème pour la planète n’est pas l’activité bancaire en elle-même, mais les entreprises financées par les banques.
Une banque peut soutenir financièrement de deux façons différentes :
- elles fournissent des prêts que les entreprises / particuliers (voire États avec les obligations) remboursent avec intérêts, ce qu’on appelle des financements,
- elles peuvent investir directement dans les entreprises en achetant des parts (action cotées ou non cotées), c’est ce qu’on appelle les investissements.
Les financements
Les financements, plus connus sous le terme de “prêts” ou “crédits” peuvent être utilisés pour financer des projets tels que l'achat d'une maison, le financement d'une entreprise, des recrutements etc.
On dit que la banque est créancière du particulier ou de l’entreprise à qui elle prête de l’argent. Les banques gagnent de l'argent en facturant des intérêts sur les prêts qui peuvent être plus ou moins importants en fonction de la durée de remboursement, du risque du projet qui nécessite le prêt ou bien des conditions économiques et monétaires du moment. Ces prêts devront être remboursés à la banque à une échéance plus ou moins longue.
Contrairement à ce que l’on pense, ces financements sont le plus souvent une création monétaire ex-nihilo, c’est-à-dire que l'argent est créé à partir de rien. Il ne s’agit donc pas des dépôts des autres clients ou clientes. Cette création monétaire est limitée par les exigences de fonds propres et les réserves obligatoires.
La création monétaire est la principale source de financements mais ce n’est pas la seule. Les financements peuvent également venir des dépôts de ses clients et des produits d’épargne comme par exemple le livret A qui sert à financer le logement social. C'est l'adage « les dépôts font les crédits ».
En revanche, les fonds déposés à la banque, même s’ils sont cantonnés peuvent, dans une certaine mesure permettre d’augmenter les réserves obligatoires à la BCE (Banque Centrale Européenne) et donc participer indirectement à une légère augmentation de son pouvoir de création monétaire, grâce à laquelle elle peut potentiellement soutenir des projets néfastes pour le climat.
Pour en savoir plus, lire notre article :
Les investissements
Les banques peuvent également financer l’économie en investissant dans des actifs financiers tels que des actions, des fonds communs de placement, etc. Dans ce cas, la banque ne récupère aucun intérêt, ni de remboursement de la part de l’entreprise mais détient en contrepartie une part de l’entreprise, elle en devient l’actionnaire. Dans ce cas, la banque peut gagner de l’argent de deux façons différentes :
- Les dividendes : Ce sont les sommes versées à titre de revenus par l’entreprise à ses actionnaires. Le versement des dividendes n’est pas automatique, en général ils viennent des bénéfices réalisés sur l’année passée.
- La revente : Lorsqu’un actionnaire décide de revendre (selon les conditions de liquidité) toute ou partie de ses actions dans une entreprise, il peut espérer réaliser un gain financier si la valeur de l’action a augmenté depuis son achat (il peut également en perdre).
La banque peut à la fois investir son propre argent (ses fonds propres, le plus souvent via sa banque d’investissement) ou l’argent disponible sur les différents comptes des clients ou clientes (comptes épargne Assurance Vie, PEL ou PEA, mais aussi le compte courant dans une certaine limite). Ces sommes d’argent sont utilisées pour financer des entreprises et organisations et notamment celles de l’industrie des énergies fossiles. Les banques en tirent généralement un rendement élevé à court terme, et avec un risque de perte financière considéré comme faible.
Ainsi, il existe plusieurs leviers qui permettent aux banques de soutenir des projets et entreprises, d’où l’importance de savoir ce qui est fait de notre argent.
Pour en savoir plus, lire notre article “Comprendre les banques et la place de Green-Got”
La finance, premier pollueur mondial ?
Notre argent finance la crise climatique
Et cela ne date pas d’hier. Historiquement, nos banques sont liées aux industries carbonées et notamment aux industries fossiles, puisqu’elles ont été crée pendant les Révolutions Industrielles au XIXème siècle au moment où il fallait développer ces industries. Depuis, notre société s’est développée sur la consommation d’énergies fossiles, qui représente encore aujourd’hui 81% du mix énergétique primaire mondial.
Pour se développer, ces entreprises ont eu besoin du soutien des banques : mines de charbon, exploration pétrolière, pipelines ou encore centrales thermiques à flamme, toutes ces infrastructures ont demandé des capitaux. Depuis quelques années, plusieurs organisations se sont intéressées aux financements des banques à ces industries.
“La plupart des banques européennes, en particulier françaises, sont intrinsèquement hostiles à la transition écologique. Pourquoi ? Parce que beaucoup d’entre elles ont dans leur bilan énormément d’actifs hérités de la révolution industrielle et qui sont donc liés aux hydrocarbures fossiles. Rien de très étonnant à ça : le bilan de nos banques est simplement le reflet de notre histoire.” - Gaël Giraud, entretien de novembre 2019.
Chaque année depuis 2017, le rapport Banking on Climate Chaos analyse les investissements des 60 plus grandes banques mondiales dans le secteur des énergies fossiles. Dans le dernier rapport de 2022, il est annoncé que depuis l’Accord de Paris sur le climat en 2016, 4 582 milliards de dollars ont été investi dans les énergies fossiles, dont 742 milliards en 2021. Les banques françaises ne sont pas en reste, puisqu’elles ont financé ces industries à hauteur de 350 milliards d’euros en 5 ans.
À court terme, les entreprises à l’origine de la production des énergies fossiles sont les plus rentables financièrement et sont donc favorisées par les banques pour maximiser leurs bénéfices. Il n’y a qu’à voir les bénéfices de Total en 2022 : 19 milliards d’euros.
Un soutien aux bombes climatiques…
Alors que l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) demande à ce que plus aucun champs pétrolier ou gazier ne soit développé pour lutter contre le changement climatique, les banques ne semblent pas encore avoir eu le mémo. Ainsi, le récent projet EACOP (Eastern African Crude Oil Pipeline) est un exemple du type de projets encore financé par les banques, malgré leur impact sur le climat, la biodiversité et les communautés locales. Le géant pétrolier français Total et la China National Offshore Oil Corporation sont sur le point de construire un gigantesque oléoduc de pétrole brut chauffé en plein cœur de l'Afrique, déplaçant des communautés et mettant en danger la faune et la flore. Ce projet à lui seul émettrait l'équivalent de 6 fois les émissions annuelles de l'Ouganda. Ce projet est ce que l’on appelle une “bombe climatique”, c’est-à-dire un projet d’infrastructure fossile qui pourrait conduire à un réchauffement du climat incontrôlable.
… et à la déforestation
Les énergies fossiles ne sont pas le seul secteur soutenu par les grandes banques mondiales qui participent au changement climatique. Un rapport de 2022 de Disclose et de Reporter Brasil montre que les 4 plus grandes banques françaises ont financé des entreprises agroalimentaires liées à la déforestation au Brésil pour plus de 743 millions d’euros entre 2013 et 2022, parfois même en totale contradiction avec les engagements pris. Pour mémoire, la déforestation représente 11% des émissions de gaz à effet de serre mondiales.
L’argent que nous déposons sur nos comptes en banque a donc une vie bien remplie, et souvent cette vie est très émettrice de gaz à effet de serre. Ces émissions sont le reflet de choix qui ne prennent pas ou peu en compte l’impact sur le climat ou la biodiversité des activités des entreprises soutenues.
Si vous voulez en savoir plus sur l’impact de votre argent à la banque, nous vous conseillons un peu de lecture :
Les banques ne devraient pas être le problème mais la solution.
Si les banques sont aujourd’hui en grande partie responsables du problème climatique, nous pensons chez Green-Got qu’elles peuvent et qu’elles doivent devenir, dans le contexte actuel, la solution.
On considère souvent que la France a un poids marginal dans la lutte dans le changement climatique car elle ne pèse que pour 1% des émissions de CO2e mondiales, selon l’Agence Internationale de l’Énergie. Changer nos habitudes ne permettraient donc pas de changer le monde ? Ces études ne prennent en compte que les émissions intervenant sur le territoire français et ne comptabilisent pas celles liées aux investissements réalisés à l‘étranger avec l’argent des Français et Françaises. Les banques, et plus largement le secteur financier ont donc un rôle clé à jouer. Et nous aussi, si nous choisissons avec attention ce que notre argent finance.
Comment mesurer la responsabilité climatique des banques ?
Aujourd’hui, il existe plusieurs acteurs et études connues qui étudient la responsabilité des grandes banques françaises et internationales dans le financement des énergies fossiles et la crise climatique. Nous avons notamment cité plus haut plusieurs rapports comme celui d’Oxfam ou de Banking on Climate Chaos.
Ces rapports cherchent à définir la quantité d’émissions qui a été permise grâce aux financements ou investissements d’une banque, notamment dans les énergies fossiles. La méthodologie la plus utilisée pour calculer les émissions d'un investissement est celle de la Partnership Carbon Accounting Financials (PCAF). Cette méthode de calcul permet d’associer un volume d’émissions de gaz à effet de serre à chaque financement réalisé par la banque ou un fonds d'investissement, selon le type d’actif financier.
On considère avec cette méthode, qu’une banque est responsable des émissions à la hauteur de son soutien financier. Pour réaliser ce calcul, il faut à la fois connaître le bilan carbone des entreprises financées par les banques et connaître l’ensemble des flux financiers des banques vers ces entreprises. Avec ces deux informations, on peut imputer les émissions de gaz à effet de serre à la banque selon une logique simple : les émissions de gaz à effet de serre dont la banque est responsable sont celles qu’elle a rendues possibles grâce à son soutien financier.
Ainsi, on considère que si l’on finance une centrale à charbon, on est pour partie responsable des émissions de celles-ci, qui ont été permises grâce à (ou à cause de) l’argent investi. Ces émissions peuvent être comptabilisées au niveau de l’entreprise ou de la banque (risque de double comptabilité), ce qui permet de montrer qui a le pouvoir d’agir sur ces émissions, ce que l’on appelle la responsabilité climatique. L’entreprise qui possède la centrale peut choisir de se tourner vers des énergies décarbonées, la banque qui la finance peut arrêter son soutien ou le conditionner à une transition alignée aux objectifs climatiques.
Note : il n’est pas simple d’identifier la totalité des transactions réalisées, notamment parce que les banques font appel au secret professionnel vis-à-vis de leurs clients et que certaines transactions sont trop opaques ou trop peu répertoriées. Par ailleurs, le bilan carbone des entreprises financées ne prend pas toujours en compte l’ensemble des 3 scopes. C’est pourquoi le calcul des estimations de gaz à effet de serre associées à notre argent doit être amélioré pour limiter les marges d’incertitude et que la transparence est un enjeu clé pour la transition du secteur financier.
Réorienter les fonds financiers vers la transition écologique
C’est pourquoi il est temps de réorienter notre argent vers une économie plus vertueuse pour notre environnement et pour nous-mêmes : un choix qui n’aura aucun impact sur les habitudes de l’usager et pourtant un si grand impact sur l’avenir de notre écosystème.
Les banques disposent de plusieurs leviers pour participer à la transition de l’économie : elle peut conditionner ses financements à l’atteinte d’objectifs climatiques, elle peut faire de l’actionnariat actif pour contraindre les entreprises à modifier leurs politiques, exclure progressivement ou complètement les secteurs incompatibles avec la lutte contre le changement climatique ou encore favoriser les entreprises des secteurs clés de la transition.
En effet, les infrastructures nécessaires à la transition : isolation thermique, transports en commun, énergie décarbonée, agriculture responsable… ont besoin de lourds investissements financiers et auront des bénéfices marchands mais également non-marchands significatifs à moyen et long terme. La Cour des Comptes Européenne estime que les besoins de financement pour assurer la transition écologique entre 2021 et 2030 à l’échelle européenne s’élève à 1 120 milliards € par an, soit environ 145 milliards d’euros pour la France seule. Cet argent, il existe déjà, c’est celui que nos banques prêtent aux industries polluantes.
Et si l’on manque d’idées de solutions à financer, l’américain Paul Hawken a écrit un livre entier sur le sujet “Drawdown” dans lequel il liste 100 solutions pour réaliser la transition écologique, les émissions mais également les coûts financiers qu’elles permettent d’éviter. Les banques ont donc tout à gagner à financer la transition écologique plutôt que la crise climatique. Et nous aussi.
Si vous voulez en savoir plus sur les secteurs que nous avons choisi de soutenir, vous pouvez lire notre thèse d’investissement
ici
Comment faire sa part ?
Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus nombreux et nombreuses à savoir que certaines de nos activités sont nocives pour le climat : surconsommation de viande, consommation de produits importés de loin, voyages en avion et en voiture de plus en plus longs et fréquents… Cependant les mentalités s’éveillent : une étude fait état de 40% des Français et Françaises se déclarant « fléxitarien·ne » (c’est-à-dire diminuant leur consommation de viande) et depuis 2019, un nombre croissant de Français et Françaises reprennent leur vélo avec une augmentation de 31% par rapport à 2019.
Ces actions, qui demandent parfois des efforts et sacrifices au quotidien, sont essentielles, et si elles sont effectuées par chacun et chacune, permettent de réduire d’au moins 25% notre empreinte en France (étude “Faire sa part”, Carbone 4). Un autre levier d’action permet d’agir au delà de notre quotidien, en incitant les entreprises à changer leurs pratiques : grâce à notre argent à la banque.
Selon l’application Rift, basée sur les données de Carbone4, 4 000€ dans une des 3 plus grandes banques françaises représente 2tonnes de CO2e par an, soit 175 repas avec du boeuf ! En réduisant les émissions associées à notre argent à la banque, nous participons à réduire les émissions de gaz à effet de serre globales et à soutenir la transition écologique.
Et nous ne sommes pas les seul·es à le dire, selon François Gemenne, le premier geste écolo est de “changer de banque”. Un geste simple et efficace. Et nous y sommes prêtes et prêts : 76 % des Français et des Françaises considèrent l’impact environnemental de leur épargne comme un sujet important (étude de l’Autorité des marchés financiers).
Il est donc temps de réorienter notre argent vers une économie plus vertueuse pour notre environnement et pour nous-mêmes : un choix qui n’aura aucun impact sur les habitudes de l’usager et pourtant un si grand impact sur l’avenir de nos écosystèmes.